Hommage à Yannick... Yannick, un des piliers fondateurs de la plupart des avancées de notre sport depuis sa naissance en France, nous a quittés dans l’exercice de ses fonctions. Bien sur, il a été un des membres du premier comité directeur du CPTC, première structure nationale tout en ayant des responsabilités au club d’élevage d’alors, la RASCN. Il a été des premiers camps de Traîneau à Névache, des mises en place des courses de Chamrousse, Prémanon, Champagny en Vanoise, Plans d’Hotonnes qui deviendra Cuvery, sans oublier Les Fourgs et ses âpres discussions avec les Bourris. Il a été des premiers Championnats de France, de Belgique avec le célèbre “Frites à 800 mètres” en guise de panneau officiel de non-priorité sur les derniers hectomètres de la course de Chamrousse servant de support à ce Championnat. Il a été aussi des premiers camps de traîneau … sur terre faute de neige à Serre Chevalier et aux Fourgs sans oublier les milliers de kilomètres parcourus avec le break 504 familiale jusqu’au fin fond de notre Europe d’alors pour assister à d’improbables réunions de SPOKO (prononcez CHPORT KOMMISIONNE) en allemand voire pire…. en Suisse Allemand pour représenter la France dans cet univers où nulle nation non germanophone n’avait encore osé s’aventurer. Seul, Ernst Muller avait pitié de notre air ahuri devant ce fossé d’incompréhension et osait des traductions aussi partielles que simultanées jusqu’à ce que ce petit monde condescende, enfin, à accepter l’anglais comme langue officielle pour intégrer la première nation latine du sport. Je me souviendrai de la reconnaissance que cette communauté nous a octroyée en nous chargeant de l’accueil de la prochaine réunion de cette commission sportive des clubs européens de chiens nordiques qui géraient alors le sport. Cet honneur nous allait droit au cœur, mais, trop jeunes, trop intimidés et par encore rodés à ces réunions d’associations nationales et internationales, nous étions incapables de la « leader » comme il aurait fallu. Ernst Muller une fois de plus, vola à notre secours. C’était dans les années 80 au Gardot dans le Doubs. Le sport français était sur une rampe de lancement quasi-verticale et le challenge du club permettait d’équiper de vestes Francital, de Lunettes Vuarnet les attelages Suisses qui participaient alors au développement du sport en France sans oublier les quelques milliers de francs…. français que nous pouvions distribuer en fin de saison aux attelages les plus réguliers dans leur participation. Yannick a été partie prenante de cet âge d’or. Il a été aussi des 5 attelages de course nourris avec des régimes différents et étudiés par Dominique Grandjean et la chaire de Nutrition de Maisons-Alfort. Il y avait parmi nous Henriette Verny, Pascal Nicoud, Jacques Philip. Avancée décisive dans la recherche en matière de Nutrition, la notoriété acquise par Dominique depuis lors est aussi redevable envers Yannick. Pendant ce temps, remarquable homme de chien, il a été le premier à appliquer le précepte que des chiens bien dans leur peau font de bons attelages. Avec un feeling extraordinaire, il sortait 90 % du potentiel des Pieds Agiles, ce qui lui permettait de tenir la dragée haute des attelages bien plus affûtés en termes de type. Bon et beau fut le credo de Yannick et Christine, indéfectiblement, pendant toute leur carrière et même après Heidi Ruh, Hans Zedinger, Peter Thomas, âme du chenil KOKO Tengri’s, Ernst Kull, Jacob Kung, Iwan Schmid, Rudi Butikofer, Rudi Indermuhle, Heinz Sclhapfer furent les témoins des performances européennes étonnantes de ce "frenchy" avec des chiens classiques, normaux et standards. Écumant les pistes de Todtmos, Saignelegier, Sils, Lenk toujours aux avant-postes européens, il a entraîné derrière lui nombre de futurs coureurs qui s’illustreront dans nos sports. Tof Damalix, Kalou Ketterer, Bernard Pépin, les Devernay, les Leduc, Trouillot, Guichard, Djian, Flachaire, Mangeon, Bedarride, Begou, les sœurs Perrichon/Pierme, même des pulkaïstes comme Alain Rapin et d’autres ont suivi sa trace avec du Pieds Agiles pour la plupart. Nous n’oublierons pas non plus ceux qui n’ont pas saisi la dimension du feeling nécessaire à l’éclosion des grands attelages et ont pu avoir moins de succès alimentant ainsi la dualité chien de course/ chien standard. Il a été aussi de la fondation de l’ESDRA et un de ses premiers Directeurs de Courses diplômé en 1985, de la transformation du CPTC en FFPTC et par la même, fondateur d’un des premiers clubs régionaux, le CSTP. Il a été des Championnats d’Europe des Fourgs en 1986 et ses conséquences. Toujours dédiés aux Sibs, Christine et Yannick furent les hôtes, dans leur maison à la Combe de Lancey, de la réunion chargée d’un immense espoir de ce 14 juillet 1986, qui devait définir au sein d’une FFPTC ouverte une des missions désormais dévolue aux clubs de race : celle de primer, valoriser, mettre en exergue au sein de courses ouvertes les attelages pure-race. Cette nouvelle vision née et négociée chez Yannick avec Mlle Lecat, Monique Bartolozzi, Bernard Pépin et votre serviteur allait servir de modèle dans toute l’Europe. Le modèle, comme on le voit aujourd’hui, 20 ans après, a fait malheureusement long feu mais Yannick extrêmement fidèle à ses visons du futur de nos sports ainsi que celles du Sib. prendra fait et cause pour l’ouverture et est resté fidèle à cette vision. Il a donc été aussi du schisme et partie prenante de la fondation de la FFTP qui deviendra la FFST. Il sera aussi dans la charrette des radiés de la FFPTC qui, pourtant, lui devait tant. Même après avoir purgé sa peine de 5 ans, lui qui avait échappé à la "perpet" de quelques autres, Yannick restera solidaire et restera parmi nous, alors qu’il avait le choix de faire amende honorable et revenir dans le giron de la FFPTC au prix, certes, d’une probable autocritique lors de laquelle il aurait dû renier ses combats et convictions. Ce n’était pas le style de Yannick. Le louvoyage et la godille ne faisaient pas partie de ses pratiques. Il paiera cher cette fidélité. Attelage et élevage très en vue par ses résultats aussi bien en expos qu’en courses, par ses compétences et connaissances, incontournable du monde du sibérien, on assistera à une irréversible mise à l’écart devant la montée d’affixes plus opportunistes. La partie sibérienne de la RASCN commençait à se trouver à l’étroit dans ce club générique du Samoyède et des Chiens Nordiques. Yannick et Christine se relanceront en participant à la création, à l’amiable, du SHF, en animant sa course au Cuvery avec Michel et Andrée Devernay et en mettant en place le Brevet de Travail contribuant ainsi à “contraindre” les chiens nordiques qui écument les Excellents, CAC et CACIB en expo à essayer de ressembler à des chiens de traîneau, au moins le temps de quelques manches. C’est dans l’exercice de cette ultime fonction que Yannick a pris la piste pour une Iditarod infinie et, nous, spectateurs incrédules de sa disparition brutale, nous t’applaudirons, du bord de la piste… à jamais. Thierry Bloch
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